samedi 7 juin 2014

Réussir (ou pas) la couverture de son livre

Pour illustrer ce propos, et l'évolution que peut subir une idée de départ, voici d'abord un premier dessin vite griffonné aux crayons de couleur sur du papier de couleur, assez moyen, avouons-le :


Puis voici la première maquette que j'en ai tirée :  





Comme vous le constatez aisément, les couleurs originales ont subi un traitement assez violent. D'un point de vue artistique, il est tout à fait discutable. D'un point de vue rationnel, il est aberrant. Néanmoins ce n'est pas le problème. La couverture d'un livre, comme son titre, appartient au domaine promotionnel, ou publicitaire, et non au domaine artistique.
Naturellement, vous n'êtes pas obligé de me croire et d'adhérer à cette opinion tranchée. Mais alors vous ne ferez sans doute pas un bon maquettiste.
La vraie question est d'annoncer clairement quel genre d'histoire vous vous apprêtez à lire.
Le fait de mettre une femme nue sur la couverture pouvait sembler une bonne base de départ: rien de moins sûr à la réflexion. Se retrouver classer dans la catégorie "érotique" n'a vraiment rien d'un cadeau pour un auteur un tant soi peu ambitieux, littérairement parlant, même si le récit comporte en effet quelques passages pouvant être qualifiés d'érotiques. La couverture se doit de renseigner le lecteur d'une façon plus immédiate et concrète pour ainsi dire sur la nature du contenu de ce qu'elle renferme, mieux que les quelques lignes laborieuses que l'auteur ou l'éditeur affichera en dos de jaquette dans l'espoir d’appâter le chaland (ceci est encore du domaine publicitaire). Ainsi, dans le cas présent, le dessin original avait au moins un gros défaut : il n'informait guère le lecteur sur le genre et l'ambiance de la nouvelle. Cette ambiance de carte postale - une jolie fille nue dansant sous les cocotiers dans le chaud soleil des Tropiques - ne convient guère à une histoire fantastique. En revanche, une jolie fille nue dansant sur une plage déserte, la nuit, ou bien au crépuscule, dans une lumière spectrale, évoque déjà davantage le sujet : fantômes, sabbat, vaudou, sorcellerie, rites païens...
Mais ce n'était toujours pas assez bon. Le cadre est vraiment trop minimaliste. De plus, il y avait ce problème de nudité un peu trop manifeste pour ne pas voir le livre catalogué dans la mauvaise catégorie. Aussi ai-je décidé de procéder à un recadrage complet de la scène - identique en fait dans ses éléments principaux - en insistant beaucoup plus sur l'aspect fantastique et en faisant l'effort sur le paysage plutôt que sur le personnage. La scène se passe cette fois au coucher du soleil et la danseuse est vue, entrevue plutôt en contre-jour, de bien plus loin, toutes choses qui sont d'ailleurs conformes au texte.
Vous remarquerez que le personnage central, devenu presque minuscule et légèrement modifié dans ses proportions pour mieux coller à la danseuse plus robuste du récit, est devenu presque indiscernable dans l'ombre, ce qui à mon avis, est bien plus intrigant. Et après tout, c'est le but, non?